L'une des préfectures les plus septentrionales du Japon, Akita est une vaste région réputée pour ses sources thermales, sa culture colorée, ses hivers neigeux et la beauté de ses sites naturels, de la mer du Japon aux montagnes et plaines luxuriantes.
Dans cette préfecture façonnée par les éléments, la nourriture revêt une signification unique qui dépasse la simple saveur et la présentation. Elle est ancrée dans la durabilité, développée pour résister aux hivers rigoureux grâce à la fermentation, la conservation et l'utilisation judicieuse des ressources disponibles, comme les légumes de montagne, le gibier, les fruits de mer et le riz. Des méthodes de cuisson robustes garantissent non seulement des repas chauds et nourrissants au quotidien. La cuisine fait aussi partie des festivals et des traditions du Nouvel An.
Sixième plus grande préfecture du Japon, Akita possède une topographie variée, composée de bassins intérieurs, d'une zone littorale et de plaines rizicoles, le tout recouvert d'un épais manteau neigeux en hiver. Chaque territoire a développé des pratiques culinaires distinctes qui perdurent encore aujourd'hui. Désormais, la culture gastronomique d'Akita est bien plus qu'une simple méthode de survie. Elle est l’héritière des histoires et de la sagesse ancestrales de la préfecture.
Qu'il s'agisse de légumes ou de poissons marinés, de nouilles savoureuses ou d'un ragoût fumant de légumes sauvages, partons à la découverte des saveurs exquises et de la richesse de la gastronomie d'Akita.
Le connexion entre les mets et la nature à Akita
Régions enneigées et bassins intérieurs
Chaque année, pendant de nombreux mois, Akita est confrontée à des températures glaciales et à d'importantes chutes de neige. Autrefois, ces conditions extrêmes rendaient la cueillette, la chasse et même les déplacements difficiles. Pour survivre, les habitants devaient s'adapter et être autosuffisants.
Dans le nord d'Akita, notamment dans les villes actuelles d'Odate et de Kazuno, les habitants ont développé des techniques de conservation et de préservation, qui sont à l’origine de la culture ingénieuse des matagi. Chasseurs-cueilleurs traditionnels, les matagi vivent en harmonie avec la nature du nord d'Akita depuis plus de mille ans. Ils salent le poisson pour l'hiver, cueillent des plantes sauvages et, surtout, chassent l'ours. Chaque animal abattu est considéré comme une bénédiction des dieux, et les matagi l'utilisent au maximum. Rien ne se perd.
Bien que le nombre de matagi ait diminué ces dernières années, certains perpétuent encore ces coutumes. Les voyageurs peuvent même réserver des excursions avec des matagi pour en apprendre davantage sur ce mode de vie riche de sens et déguster des plats traditionnels comme le kiritanpo (riz concassé enfilé sur une brochette de cèdre et grillé) ou le nabe (pot au feu) d’ours.
Le sud d'Akita, autour des villes actuelles de Yokote et Yuzawa, est également le lieu d'épaisses chutes de neige. C'est ici qu'a été développée une méthode de conservation unique au monde, combinant fumage et fermentation, donnant naissance à un type de légume mariné appelé iburi gakko. Durant ces mois d'hiver, il était difficile de faire sécher complètement le radis daikon au soleil. Les habitants optaient donc pour un séchage à l'intérieur des maisons, au-dessus du foyer, ce qui conférait aux légumes marinés un arôme fumé.
La région est également réputée pour son agriculture florissante, à l'origine de nombreux produits transformés à base de riz, et pour ses prestigieuses udon Inaniwa, connues comme l'une des trois meilleures nouilles udon du pays. Le miso et la sauce soja, deux des produits fermentés les plus appréciés du Japon, jouaient également un rôle important dans la gastronomie locale, servant de base aromatique aux fondues japonaises et aux légumes.
La côte de la mer du Japon
Akita borde la mer du Japon et, dans ses régions centrales, comme la ville d'Akita et Yurihonjo, les fruits de mer abondent. Pour savourer ces délices jusqu'au cœur de l'hiver, les habitants ont développé des techniques de fermentation pour conserver les produits de la mer, créant ainsi des mets typiques comme le hatahata sushi et la sauce de poisson shottsuru. Ces recettes symbolisent l'alliance des fruits de mer et des techniques de fermentation et sont profondément ancrées dans les festivités hivernales et les traditions du Nouvel An de la région.
Plaines fertiles
S'étendant principalement dans le sud et le centre d'Akita, les plaines ont longtemps été un haut lieu de la riziculture. L'abondance de riz de haute qualité a donné naissance à une culture culinaire centrée sur cet aliment de base japonais, avec des plats comme l'udon, les yakisoba, le saké et les douceurs locales, tous accompagnés riz.
L'art de la fermentation et de la conservation
Comme mentionné précédemment, les habitants ont largement utilisé les techniques de fermentation et de conservation pour survivre aux longs hivers d'Akita. Cette nécessité culinaire a donné naissance à des plats emblématiques d'Akita, qui occupent encore aujourd'hui une place de choix dans la gastronomie de la préfecture.
L'iburi gakko, ce légume mariné, est un incontournable de l'hiver à Akita. En japonais, « iburi » signifie « fumage » et « gakko » se traduit par « légumes marinés », une description qui résume parfaitement le plat. Pour préparer l'iburi gakko, des radis daikon, mis en bottes, sont fumés lentement au-dessus d'un foyer pendant deux à cinq jours. Ils sont ensuite marinés avec du son, du sel et du sucre (selon chaque recette familiale). Ce plat se conserve tout l'hiver et possède une saveur umami caractéristique, légèrement fumée.
Le sushi de hatahata est un autre plat régional issu de la fermentation. Également appelé poisson des sables, le hatahata est un poisson des grands fonds qui migre vers les eaux peu profondes près d'Akita de fin novembre à décembre. Du fait de son abondance à cette période de l'année, le hatahata est depuis longtemps associé aux traditions hivernales d'Akita. Pour conserver ce poisson abondant, les habitants ont créé un sushi spécifique : du hatahata mariné dans du sel, du malt de riz et des carottes. C'est un incontournable des repas du Nouvel An à Akita, réputé pour ses notes aigres-douces et umami.
Le hatahata est aussi l’ingrédient principal du Shottsuru, l'une des trois principales sauces de poisson du Japon. Pour fabriquer le Shottsuru, le poisson est salé et laissé à fermenter pendant une longue période, de un à trois ans ! Le liquide obtenu lors de ce processus est le Shottsuru. Autrefois, la sauce soja était considérée comme un produit de luxe. À Akita, beaucoup utilisaient donc du shottsuru pour assaisonner leurs soupes et leurs ragoûts.
Bien qu'autrefois onéreuses, la sauce soja, tout comme le miso, reste indispensable à la cuisine familiale et aux méthodes de conservation d'Akita. La brasserie Yamamo, située à Yuzawa, perpétue les techniques traditionnelles de fabrication de la sauce soja et du miso depuis 1867. Aujourd'hui, elle propose des visites guidées permettant aux visiteurs de découvrir l'univers de la fermentation et de déguster une variété de ses produits.
La sagesse de l'harmonie avec la montagne
Dans les montagnes d'Akita, la culture culinaire s'épanouit au rythme des saisons et se caractérise par une utilisation durable des ressources locales.
Le nabe d'ours est un plat qui illustre parfaitement cette philosophie. En hiver, la viande d'ours est une source essentielle de protéines et de nutriments. Lorsque les matagi abattent un ours, ils le considèrent comme une bénédiction des dieux de la forêt et utilisent respectueusement chaque partie de l'animal – peau, viande et abats – afin de ne rien gaspiller. Au printemps, ils partent également à la cueillette de légumes sauvages selon le même rituel, témoignant ainsi des liens étroits qui unissent la nature, la spiritualité et la cuisine dans le nord d'Akita.
Le nabe d'ours se compose généralement de viande d'ours, de légumes variés et de champignons mijotés dans un bouillon parfumé au saké et au miso. Ce ragoût fumant et riche en protéines est un réconfort idéal face aux rigueurs de l'hiver.
Autre aliment de base des montagnes d'Akita, le kiritanpo est une purée de riz enroulée autour d'une brochette de cèdre et grillée au charbon de bois. Cette méthode de cuisson permettait de conserver le riz plus longtemps et de le transporter plus facilement pour la chasse, l'exploitation forestière et l'agriculture. Le kiritanpo possède une saveur douce, légèrement sucrée, et un subtil arôme fumé apporté par le charbon de bois. On le déguste généralement en ragoût (kiritanpo nabe) et nappé de miso (miso tanpo). Ce plat polyvalent illustre la capacité d'Akita à réinventer et à exploiter au maximum les ingrédients locaux.
Les saveurs du quotidien et des fêtes
Outre sa cuisine profondément liée à la nature, Akita abrite de nombreux plats historiques et contemporains qui font partie intégrante de son riche patrimoine culinaire.
Remontons au milieu du XVIIe siècle, à l'époque où l'Inaniwa udon a vu le jour. Ce type d'udon est étiré à la main plutôt que coupé au couteau, ce qui donne des nouilles plus fines et plus plates que les udon traditionnels. Il a été célébré dans la poésie comme un chef-d'œuvre artistique qui fusionne gastronomie et culture. En effet, ces nouilles étaient si prisées que les daimyos (seigneurs féodaux) d'Akita les offraient souvent en cadeau au Shogun durant l'époque d'Edo (1603-1868). Ces nouilles élégantes se dégustent aussi bien chaudes que froides, ce qui les rend idéales en toute saison. Elles sont appréciées pour leur texture à la fois moelleuse et ferme, et leur onctuosité en bouche.
En parlant de nouilles, les yakisoba de Yokote sont un autre plat régional incontournable. Cette variété locale serait apparue vers 1950. Les yakisoba plus courants se composent de nouilles épaisses et droites sautées avec du chou, du porc et une sauce aigre-douce. Ce qui distingue les yakisoba de Yokote, ce sont leurs garnitures supplémentaires : des légumes marinés Fukujinzuke et un œuf au plat. Son prix abordable et son goût délicieux en ont rapidement fait un favori local, et aujourd’hui, il est considéré comme l’un des trois grands types de yakisoba du Japon.
Si l’hiver est l’une des saisons emblématiques d’Akita, l’été est l’occasion de goûter à la glace Baba-hera. Les principales artères d'Akita sont alors envahies par des vendeurs proposant cette gourmandise. Ces étals sont tenus par de charmantes dames âgées, appelées Baba en dialecte d'Akita. Elles utilisent des pelles en métal, appelées hera, pour modeler artistiquement la glace – généralement rose ou jaune – en forme de rose ou de tulipe. C'est un véritable chef-d'œuvre, presque trop beau pour être mangé.
Terminons notre voyage culinaire par un aperçu du saké de grande qualité d'Akita. Bénéficiant d'une eau souterraine pure, de riz cultivé localement et d'un climat frais propice à la fermentation, Akita est l'une des meilleures régions productrices de saké du Japon, réputée pour ses techniques de brassage innovantes. Son saké, au goût riche et onctueux, est un élément incontournable des festivals et de la culture culinaire locale, et s'accorde à merveille avec la plupart des plats mentionnés précédemment.
Akita : Une cuisine remarquable façonnée par la nature
À Akita, un plat simple est souvent plus qu’un simple met, comme des légumes marinés, des gâteaux de riz grillés ou un ragoût copieux. Il renferme le passé de la région, façonné par le mode de vie et l'adaptation des habitants à leur environnement. Chaque territoire a transmis sa propre histoire, qui se reflète encore aujourd'hui dans les recettes traditionnelles. Les visiteurs peuvent découvrir des techniques de fermentation et de conservation nées des hivers rigoureux et savourer une cuisine montagnarde profondément enracinée dans la terre. Des ajouts récents à la palette culinaire d'Akita, comme le yakisoba de Yokote, témoignent de la capacité de sa culture gastronomique à évoluer avec son temps.
Goûtez à la sagesse, à l'histoire et à la nature d'Akita à chaque bouchée.