Bonjour à tous et bonne année !
Pour mon premier article sur JapanTravel, j'ai envie de vous raconter comment j'ai fêté mon premier Nouvel An au Japon et donc comment se déroule cette fête très importante pour les Japonais.
お正月: Le Nouvel An Japonais
Le Nouvel An Japonais, aussi nommé Oshogatsu (お正月), est célébré le 1er janvier depuis la fin du XIXè siècle et a ses propres coutumes, différentes de celles des Occidentaux. C’est certainement la fête familiale la plus importante de l’année dans la société nippone et dure même plusieurs jours. Pour nous, ce sera plutôt Noël, ici ce n’est pas le cas !
Autrefois, au même titre que le Nouvel An chinois, coréen et vietnamien, il était basé sur le calendrier chinois et était fêté au début du printemps. Depuis 1873, le Japon fonctionne sur le système du calendrier grégorien et le 1er janvier est devenu le jour officiel du Nouvel An au Japon.
Se préparer au Nouvel An
La préparation du Nouvel An, ça commence directement après Noël, dès le 26 décembre. Du 26 au 30 décembre, les Japonais se consacrent à : le grand ménage, dit nenmatsu no osoji (年末の大掃除), la décoration pour le réveillon, aux dernières soirées entre amis et collègues, dit bonenkai (忘年会), et l’envoi des cartes de vœux, dit nengajo (年賀状).
► 年末の大掃除 : Le grand ménage
Le grand ménage avant la nouvelle année consiste à nettoyer toute la maison de fond en comble afin de la purifier. On lave tout du sol au plafond, dépoussière et aère les tatamis, remplace les objets abîmés… La tradition de Susuharai (煤払) veut qu’une journée soit consacrée à nettoyer la saleté de l’année passée entre le 13 et le 28 décembre. Les Japonais doivent aussi avoir liquidé les affaires en cours et réglé leurs dettes. Ce grand ménage est aussi pratiqué dans les écoles et dans les bureaux.
► 門松, 標縄 et 鏡餅 : Vos décorations pour le Nouvel An
Votre maison est propre et purifiée, il est maintenant temps de l’orner pour le réveillon du 31 décembre ! Les Japonais ont pour coutume de déposer devant la porte un kadomatsu (門松), composition décorative autour de bambous et de pins censée accueillir les dieux, et d’accrocher un shimenawa (標縄), des ornements faits de cordes souvent placés aux entrées pour repousser les mauvais esprits. Les Japonais préparent également ce qu’on appelle des kagami mochi (鏡餅), des gâteaux de riz empilés l’un sur l’autre avec une orange sur le dessus. Il est aussi courant de voir des décorations mettant en scène l’animal du zodiaque de l’année à venir. L’année 2016 correspond à l’année du singe, c’est donc lui qui est à l’honneur cette fois.
► 忘年会 : Une dernière soirée
La semaine qui précède la nouvelle année est souvent consacrée aux bonenkai (忘年会), des soirées de fin d’année entre amis ou collègues. Généralement, ces soirées se passent dans les izakaya qui se retrouvent très vite complets. Vous vous retrouvez autour d’une table, mangez, buvez, riez et vous vous remémorez les bons moments et oubliez les mauvais. Une bonne occasion de bien terminer l’année et de s’apprêter à partir sur de bonnes bases pour la nouvelle année à venir.
► 年賀状 : Un petit tour à la Poste pour envoyer vos vœux
Tout comme nous, les Japonais ont aussi pour coutume de souhaiter leurs vœux en envoyant des cartes postales, ici appelées nengajo (年賀状, carte de félicitations de l’année). Cependant, elles ne sont pas rédigées au cours du mois de janvier comme les nôtres, mais au mois de décembre afin qu’elles soient envoyées avant le 28 décembre au plus tard et être réceptionnées le 1er janvier, ou du moins avant le 7. Une famille japonaise envoie en moyenne de 50 à 100 cartes. Cette tâche prenant énormément de temps, il existe des cartes postales pré-timbrées appelées nenga hagaki (年賀はがき) avec un timbre spécial aux couleurs de l’animal correspondant à la nouvelle année, ou des services internet qui s’occupent d’imprimer puis d’envoyer les cartes. Le jour de l’An, une cérémonie spéciale est tenue le matin dans chacun des bureaux de poste du Japon pour la livraison de ces cartes.
大晦日 : Le réveillon du 31 décembre
C’est le grand jour, celui de célébrer le passage à la nouvelle année ! Le réveillon, dit Omisoka (大晦日), se déroule assez traditionnellement en famille, sauf pour les jeunes qui vont faire la fête entre amis ou les pauvres voyageurs et résidents étrangers qui n'ont pas leur famille à leurs côtés.
► 年越し : Le repas du Nouvel An Japonais
Le plat principalement dégusté au réveillon est simplement un soba toshikoshi (年越し, soba de la nouvelle année). C’est le dernier plat de l’année dégusté au Japon. Ses fonctions sont à la fois pratiques et symboliques ; la préparation du Nouvel An prend tellement de temps qu’un simple plat de nouilles de sarrasin permet d’alléger la charge de travail. La forme longue des nouilles représente aussi la longévité. C’est pourquoi il faut intégralement terminer toutes ses nouilles au risque d’inviter la malchance. Tout en dégustant ce met simple et rapide à préparer, les Japonais regardent à la télé des émissions de variétés qui diffusent des sketches et des chansons traditionnelles ou modernes. Le programme ayant le plus de succès est Kohaku Uta Gassen (紅白歌合戦), une émission musicale diffusée depuis 1951 sur NHK dans laquelle une équipe de chaque sexe s’affronte pour être élu meilleure équipe par les votes des téléspectateurs.
► 除夜の鐘 : Et les cloches sonnent !
Le rituel joya no kane (除夜の鐘), a lieu dans les temples bouddhistes de l’ensemble du pays, le dernier jour de l’année. La cloche du temple est sonnée 108 fois, symbolisant les 108 tentations terriennes enseignées dans le culte bouddhiste. Cet acte est ainsi une façon de se libérer de ces pêchés avant de commencer la nouvelle année sur de bonnes bases. Certains temples permettent aux visiteurs de sonner la cloche après la fin du rituel. Le faire permettrait, dit-on, d’apporter la bonne fortune. Selon les temples, les visiteurs peuvent faire sonner la cloche gratuitement ou payer ou réserver un ticket. Il arrive également que le nombre soit limité (par exemple, en toute logique, aux 108 premiers arrivés).
三が日 : les premiers jours de la Nouvelle Année
Le passage à la Nouvelle Année est fait, mais les festivités ne sont pas encore terminées ! Le premier janvier commence en général en se levant très tôt pour aller admirer le premier lever du soleil de l’année, le hatsuhinode (初日の出), qui symbolise toutes les promesses heureuses pour l’année à venir. Ensuite, place aux repas et aux rituels !
► 初詣 : Première prière de l’année
Au cours des trois premiers jours du Nouvel An, même les Japonais qui ne sont pas particulièrement croyants ou spirituels effectuent une visite dans un sanctuaire ou un temple pour la première prière de l’année hatsumode (初詣). Et cela commence dès minuit le 1er janvier ! De ce fait, nombreux sont les gens à faire la queue des heures pour une petite offrande à la divinité du sanctuaire en allant d'abord se purifier avant de prononcer mentalement leurs vœux pour la nouvelle année. Les temples et sanctuaires les plus populaires sont ainsi incroyablement bondés. Puisqu’il peut faire assez froid, certains temples et sanctuaires offrent de l’amazake gratuit, une boisson douce et sucrée faite de riz fermenté généralement servie chaude. Bien sûr il est aussi possible de déguster d'autres boissons chaudes ainsi que des takoyaki (たこ焼), oden (おでん), soba (蕎麦) et bien d'autres. Il est parfois aussi possible d'admirer et de s'essayer à la réalisation de mochi, ces petits gâteaux faits de riz gluant qui, après avoir trempé dans l’eau pendant plusieurs heures et cuit, se fait marteler à plusieurs reprises à l’aide d’un gros maillet en bois jusqu’à ce qu’il atteigne la consistance collante et élastique désirée.
Les visiteurs tirent aussi au sort pour recevoir une prédiction écrite de l’année à venir, appelée omikuji (お神籤, loterie sacrée). Les Japonais font la queue pour tirer le leur et voir si leurs rêves et leurs projets ont des chances de se réaliser, si ils trouveront l’âme sœur et auront bonne santé et bonne fortune. On dit que lorsque la prédiction est mauvaise, il faut plier la bande de papier et l’attacher à un arbre de pin se trouvant près du sanctuaire pour conjurer le mauvais sort. Cette coutume vient d’un jeu mot entre les deux caractères matsu (松 = pin) et matsu (待つ = attendre) ce qui signifie que la malchance va attendre à l’arbre plutôt que de se joindre au porteur. Après si la prédiction est bonne, on a le choix entre l’accrocher également à un pin pour que la fortune ait un meilleur effet ou le garder avec soi en guise de porte-bonheur. Pour obtenir votre omikuji, il faut d’abord secouer une boîte en métal contenant des baguettes numérotées et en tirer une au hasard. Vous ouvrez ensuite un des casiers comportant le même numéro que la baguette pour y récupérer votre omikuji.
Les Japonais achètent également des amulettes et des talismans, appelés omamori (お守り), en rapportant ceux de l’année précédente pour qu’ils soient brûlés lors d’une cérémonie formelle ou une fois minuit passé.
Enfin, par chance si il est présent, il est possible d'admirer la danse du lion, shishimai (獅子舞), accompagné de musique festive.
► 御節 et お雑煮 : Premiers repas de l’année
Pendant les premiers jours, les Japonais savourent leurs premiers festins, osechi (御節) et ozoni (お雑煮) préparés bien à l’avance car la tradition veut que l’on ne fasse rien y compris la cuisine. La cuisine osechi se compose de plats mijotés et préparés à base d’ingrédients séchés. Chaque plat possède une signification symbolique liée à la longévité, la bonne santé, la fertilité, la joie, etc… améliorant la bonne fortune de celui qui les consomme. Quant à la cuisine ozoni l’ingrédient principal est le gâteau de riz mochi, parfois accompagné d’un bouillon.
► お屠蘇 : Kanpai pour la Nouvelle Année !
Pas seulement manger, les Japonais boivent également leur premier saké de l’année, le otoso (お屠蘇), préparé avec des herbes médicinales et censé garantir bonne santé pour l’année. Il peut être bu lors de la première visite au temple, soit en famille dès le matin.
► 羽子突き et 福袋 : Amusez-vous et offrez-vous des cadeaux !
Profitant d’être réuni en famille ou entre amis, les Japonais aiment pratiquer des jeux traditionnels comme le hanetsuki (羽子突き), un jeu ressemblant au badminton avec des raquettes décoratives en bois, ou le karuta (カルタ), un jeu de cartes ancien, et font voler des cerfs-volants.
Etant donné que le premier janvier est férié, il arrive aussi que de nombreuses entreprises et magasins ferment avant et après, créant ainsi une sorte de Golden Week, une petite semaine de vacances au cours de laquelle les Japonais peuvent en profiter pour partir en voyage ou retourner dans leur ville d’origine et rendre visite à leur famille. A l’inverse, beaucoup de magasins proposent dès le 1er janvier des fukubukuro (福袋, sacs de chance / lucky bags). Pour des prix allant de 1 000 yens à 10 000 yens (environ 7.70 à 77 euros), ces sacs contiennent un assortiment de produits qui en coûtent souvent le double, voire plus ! Les Japonais adorent cette tradition et l’esprit de surprise qui l’accompagne.
► 天皇 : Les vœux de la famille impériale
Le 2 janvier, c’est le rendez-vous au Palais Impérial pour entendre les vœux de l’Empereur aux visiteurs. C’est l’un des deux seuls jours de l’année où il est possible d’y entrer, avec l’anniversaire de l’Empereur le 23 décembre. La foule y est très dense et la famille impériale salue le public plusieurs fois dans la journée depuis un balcon protégé par une vitre. Cependant, assurez-vous de vous rendre au Palais dès le matin ! La foule qui est très dense et de ce fait l'admission dans le Palais Impérial s'effectue jusqu'à 14h00 !
► 新年会 : Et on se retrouve pour une première soirée
Tout comme les bonenkai (忘年会) en fin d’année, il y a aussi en début d’année les shinnenkai (新年会) bien que celles-ci soient moins fréquentes. Une occasion comme une autre de se retrouver entre amis et d’accueillir la nouvelle année avant de retrouver son train-train quotidien !
Voilà, vous avez bien fêtés et êtes désormais prêts à affronter cette nouvelle année qui commence ! Dernière petite note : il y a deux façons de se dire « Bonne Année » au Japon : avant le 1er janvier on dit « 良いお年をお迎えください » (yoi otoshi wo omukae kudasai = accueillez cette bonne nouvelle année) et après ce sera plutôt « 明けましておめでとうございます » (akemashite omedetou gozaimasu = bonne année, félicitations pour cette nouvelle année).