A la découverte de Niigata

Un week-end à Niigata chez une famille japonaise

En stage depuis deux mois dans la ville de Niigata, grande ville portuaire sur la côte de la mer du Japon, j'avais déjà eu l'occasion de visiter la plupart des sites touristiques les plus connus de la ville, et j'avais le sentiment de commencer à bien connaître Niigata et ses alentours. Ville de près de 800 000 habitants, Niigata est la plus grande ville sur la côte de la mer du Japon, et possède de nombreuses attractions à découvrir. Alors que je pensais en avoir fait le tour, j’ai eu ce week-end l’opportunité de découvrir cette ville et sa région plus en profondeur.

Hiroshi Kai, chef d’entreprise local, s’est proposé de m’accueillir chez lui le temps d’un week-end afin de me faire découvrir les trésors de sa région, ainsi que la vie dans un foyer japonais. Voyant ici une occasion unique, j’ai tout de suite accepté et j’ai fait mon sac pour ces trois jours dans la famille Kai.

C’est donc vendredi matin que commence ce court voyage. J’attends M.Kai devant le konbini (épicerie ouverte 24/24, il y en a chaque coin de rue au Japon) près de chez moi, sous la fine pluie de septembre. Il débarque vers 9h avec une berline bleue et un grand sourire et m’invite à monter à l’avant. Notre première destination est une usine de miso à quelques kilomètres de là (le miso étant une pâte de soja fermentée faite à partir de graines de soja, de riz, de sel et d’eau, et est omniprésent dans la cuisine japonaise). Nous arrivons donc dans la petite ville de Toyosaka, où se trouve l’usine Yamada. Juste à côté de l’usine nous croisons un groupe de personnes en tenue traditionnelle, portant un énorme Mikoshi (神輿) en forme de chien à trois têtes. Un Mikoshi est une sorte d’autel shinto portatif, souvent porté par une dizaine d’hommes, et qui est présent dans beaucoup de festivals religieux au Japon. Ce jour là était donc jour de festival, et par curiosité nous nous sommes approchés de la délégation se dirigeant vers le sanctuaire Shinto le plus proche. Nous y avons été accueillis par les locaux, qui nous ont expliqué que ce festival était dédié à la récolte, qui se fait pour le riz notamment en septembre. Tout en nous expliquant le pourquoi du festival, ils nous ont gentiment offert une coupe de saké et des pâtisseries spécialement conçues pour le festival.

Nous avons ensuite commencé la visite de l’usine, que M.Kai connaît bien puisqu’il a travaillé avec cette entreprise lorsqu’elle a essayé d’exporter ses produits à l’international. Il ne faut que six hommes pour faire tourner l’usine, car le miso suit un processus de fabrication assez simple : des fèves de soja sont broyées puis mélangées avec de l’eau, du sel, et du riz. Le tout est stocké pour fermenter pendant quelques mois, et plus le produit fermente, plus il est de qualité. L’entreprise fabrique d’autres produits à partir des mêmes ingrédients, comme de la sauce soja, ou bien l’Amazake (甘酒), que l’on peut traduire par « saké sans alcool », et qui est une boisson faite à partir de riz fermenté, et qui est supposé être excellent pour la santé. Si cette entreprise familiale produit à petite échelle, ils vendent des produits de qualités très appréciés dans la région.

Nous nous sommes ensuite rendus à Tsubame Sanjo, non loin de là, afin de déjeuner d’un fameux ramen au curry, spécialité de la ville. Le principe est simple, mais le plat est délicieux : c‘est un comme un ramen classique (soupe de nouille), mais ici le bouillon, normalement fait à partir de miso ou de légumes, est remplacé par une épaisse soupe de curry. Après ce délicieux intermède, nous sommes partis en direction de l’atelier de Gyokusendo. Cet atelier, installé dans un bâtiment datant d’il y a plus d’un siècle, fabrique de luxueuses théières et autres objets en métal à l’aide d’un savoir-faire traditionnel incroyable. À partir d’une unique pièce de métal, ils fabriquent manuellement des objets magnifiques, grâce à une technique empruntée aux artisans de l’ère Meiji (1868-1912). Nous avons pu nous approcher au plus près des artisans, et constater leur incroyable savoir-faire. En travaillant le métal avec leur marteau, ils arrivent à donner des formes infiniment précises, passant des jours entiers sur des pièces uniques. Ensuite, en jouant avec la cuisson de ces pièces, ils arrivent à maîtriser parfaitement la couleur, la texture et la résistance de leurs créations, arrivant à des résultats spectaculaires. L’artisanat local, très réputé, a connu ces dernières années un regain de popularité chez les jeunes, et des jeunes diplômés d’écoles d’art prennent peu à peu le relais sur l’ancienne génération dans l’atelier, permettant à ce savoir-faire de perdurer. Cet atelier produit aussi des coupes de saké, des casseroles, des tasses et autres objets en relation avec la dégustation de nourriture et de boisson. Leur volonté est d’offrir la meilleure expérience possible pendant la consommation de nourriture ou de boisson, et un des guides m’a expliqué que selon le récipient, le saké pouvait offrir des différences incroyables de goût et d’arome durant la dégustation.

Nous avons ensuite mis les voiles vers le marché aux poissons de Teradomari. Très réputé dans la région, ce marché occupant une grande partie de la ville vend les produits de la mer pêchés le jour même, et de ce que j’ai goûté, la fraîcheur du poisson qu’on y vend est incomparable avec ce qu’on trouve dans le commerce habituellement, même au Japon.

L’heure du dîner approchant, nous sommes rentrés au domicile des Kai où Mme Kai avait préparé le repas. Ou plutôt devrais-je dire « les » repas tant il y avait à manger sur la table. Au lieu d’un plat principal, elle avait disposé, comme on fait souvent au Japon, une multitude de plats sur la table afin que chacun choisisse son repas à sa guise. Bien évidemment tout était délicieux, et il était difficile d’imaginer une meilleure façon de finir la journée.

Le lendemain, nous partons de bon matin pour le sanctuaire shinto de Yahiko. Au milieu des montagnes, ce sanctuaire millénaire (mais reconstruit) est très populaire dans la région, et tient les promesses de sa réputation. Si architecturalement il est dans le style classique des sanctuaires shinto, le décor autour de lui est somptueux. Juste derrière lui se dresse le mont Yahiko, et le point de vue que l’on a depuis le sanctuaire est tout simplement unique. Petite anecdote qui m’a amusé, juste à côté du sanctuaire se dresse un petit autel, et M.Kai m’a expliqué que lorsque quelqu’un achète une nouvelle voiture, il l’emmène à ce sanctuaire comme pour la faire « baptiser », afin de la protéger contre les accidents.

Nous sommes ensuite partis à l’assaut du mont Yahiko, et ce malgré la pluie et un brouillard dense. Si les conditions météorologiques n’étaient pas forcément idéales pour ce genre d’escapade, la vue au sommet du mont, sur lequel se trouve un petit autel shinto, vaut le coup de l’ascension. Avec une vue s’étendant sur l’infinité de champs de riz présents autour de Niigata d’un côté, et sur la mer du Japon de l’autre, le panorama qu’offre le mont Yahiko est unique.

Pour le dernier jour du week-end, nous sommes allés au Musée des cultures du Nord, ancienne propriété du plus gros propriétaire de terrains agricoles de la région il y quelques siècles. Reconvertie en musée, cette résidence est un lieu unique tant par son jardin, sa bâtisse principale et ses annexes. La résidence principale est une immense maison de maître traditionnelle, dont la pièce principale, d’une taille de 100 tatamis (avant, on comptait les superficies en tatamis, et non en mètre carré), est ouverte sur le jardin magnifique, qui tire son inspiration des plus beaux jardins de Kyoto. Dans toute la maison, on peut sentir la richesse de la famille Ito, à travers les pièces immenses, et les divers objets exposés. Si l’on ne peut malheureusement pas mettre les pieds dans le magnifique jardin, on peut néanmoins visiter le reste de la résidence. On y trouve une maison de thé tout à fait unique, par sa forme. Au lieu d’être composée de quatre murs comme n’importe quelle maison, elle n’est composée que de trois murs, faisant de cette maison une maison triangulaire. Unique en son genre, elle apporte à la fois une impression de modernité et de décalage par rapport au style traditionnel de la résidence. On peut aussi visiter les annexes de la résidence, composées de bâtiments de fermes traditionnels, avec leur toit en paille rustique.

Ainsi s’achève mon week-end avec la famille Kai, qui m’aura accueilli pendant trois jours durant. Leur hospitalité fut incroyable, et j’ai été accueilli comme si j’étais un membre de leur famille. Après deux mois tout seul au Japon, j’ai eu l’impression le temps d’un week-end d’être à la maison, tant leur accueil chaleureux et familial était parfait. Niigata et sa région renferment des surprises que je compte encore découvrir durant mon temps ici, mais une chose est sûre, sa plus grande richesse vient sûrement de ses habitants.

Se rendre ici

Niigata est accessible directement depuis Tokyo en Shinkansen (compter 10 000 yen) en seulement deux heures

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Sébastien Duval il y a 5 ans
Un o-mikoshi en forme de chien à trois têtes ? Jamais vu au cours de mes 13 ans au Japon... Tu as vu quelque chose d'exceptionnel :)
Dorian Libet Descorne Auteur il y a 5 ans
Malheuresement je n'ai pas pu saisir l'histoire à l'origine de la forme de ce mikoshi, mais en tout cas c'est vrai que c'est assez original!

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