Ma première fois en Shinkansen

Le TGV Japonais, entre légende et réalité

Avant mon voyage au Japon, j'avais du TGV japonais une image à la fois romantique et un peu fantaisiste, qui ressemblait à ceci :

Des diplomates du monde entier se réunissent avec moi sur le quai du TGV. Evidemment, nous portons tous un costard ; c'est une affaire sérieuse. Les flashes des journalistes crépitent alors que l'Impératrice du Japon apparaît sur le quai. Elle se dirige vers la locomotive et, d'une voix haut-perchée, déclare :

"Je baptise ce train 'Shinkansen'. Que Dieu bénisse tous ceux qui voyageront à son bord".

Elle s'empare alors d'une bouteille de saké géante, et la brise sur le long nez du Shinkansen. Sur le quai, une fanfare entame l'hymne du Wisconsin, pendant que les voyageurs adressent à leurs proches un dernier geste d'adieu.

Une fois les passagers installés, le train démarre en flèche. Une voix saccadée s'élève de l'interphone, annonçant les records de vitesse que nous atteignons. 130 km/h, 160 km/h, 240 km/h. Le train commence à trembler tandis que mes joues s'inondent de larmes. A l'extérieur, le paysage devient brouillard à mesure que nous approchons de la vitesse maximale.

Si vous n'êtes encore jamais monté dans un Shinkansen, peut-être avez-vous votre propre idée de ce à quoi il ressemble. Je dois reconnaître que la mienne était légèrement à côté de la réalité.

Le légendaire Shinkansen n'est pas seulement un train fusant à travers le Japon à 320 km/h. C'est une flotte gigantesque de trains fusant à travers le Japon à 320 km/h.

Ces trains vont et viennent avec la régularité d'un métronome. Chaque TGV est composé de 16 voitures et peut accueillir au moins 1 300 personnes. Toutes les 5 minutes, l'un d'entre eux quitte la gare de Tokyo. Le Shinkansen n'a pas le luxe d'un bateau de croisière, et n'est pas réservé à une élite exclusive. Il s'agit avant tout d'un moyen de transport extrêmement fiable et fonctionnel.

Chaque jour, 323 trains circulent rien que sur la ligne reliant Tokyo et Osaka, les deux plus grandes villes du Japon, transportant 390 000 passagers par jour. Un nombre incroyable ! Pour visualiser, imaginez la ville de Nice toute entière grimper dans un train et déferler à Paris pour la journée...

Sur une année, ces trains circulent à une vitesse moyenne supérieure à 270 km/h. Pourtant, leur durée moyenne de retard se compte en secondes. Et il ne s'agit que de l'une des quatre lignes qui traversent le pays. Même les Européens, réputés pour leurs réseaux ferroviaires, en seraient impressionnés : voilà 323 trains qui ne sont jamais en retard d'une seconde !

Vous êtes peut-être habitué à ces voyages en train où l'embarquement des voyageurs et de leurs bagages s'éternise, n'en finit plus, avant de pouvoir enfin (re)démarrer. Ce n'est pas le cas dans le Shinkansen. Quand une rame de 16 voitures arrive en gare, des gens descendent, des gens montent, et en quelques instants, le train est reparti. Dans certaines stations, l'arrêt ne dure que 3 minutes.

Je n'arrive pas très bien non plus à me faire à l'idée que le train roule réellement à 320 km/h, ni même à 250. En vérité, le train est si stable que l'on ne se rend même pas compte de la vitesse. Aucune secousse, pas la moindre saccade lorsque le train accélère ou ralentit. Le seul moyen de se rendre compte de la vitesse incroyable à laquelle on voyage, c'est de regarder par la fenêtre et de voir les arbres et les bâtiments défiler si rapidement que le cerveau n'a pas le temps de les enregistrer.

Quelque part dans mon imagination, j'avais associé le Shinkansen à un roman d'Agatha Christie : cette image d'un train express promenant, à toute allure, diplomates et dignitaires à travers le pays, était bien ancrée dans ma tête. En réalité, les voyageurs que l'on y rencontre sont des utilisateurs réguliers. Ce sont des vieilles femmes, des jeunes enfants, se mêlant aux businessmen et aux familles. Juste des personnes normales, en somme, pour la plupart.

Il m'a fallu un voyage à bord d'un vrai Shinkansen pour enfin comprendre l'un des symboles du Japon. Le Shinkansen est tout simplement une merveille d'organisation et de technologie que je vous conseille vivement d'essayer lors de votre visite au Japon.

Et maintenant que j'y pense... Il ne me semble pas non plus avoir entendu jouer le chant du Wisconsin pendant mon voyage.

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